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Plus aucun sens de subventionner l'Essence! (Caisse de Compensation)

A la mi-février, le gouvernement a injecté plus de 15 milliards de dirhams supplémentaire pour préserver la paix sociale (1euro=11,5dhs). L'enveloppe de la caisse de compensation atteindrait plus de 30 milliards de dirhams à fin 2011. On est arrivé à un déficit budgétaire de 6%, ce qui pousse le gouvernement à "privatiser" les entreprises pour avoir des liquidités. Imaginez-vous vendre vos biens pour vous acheter à manger!

 

L'idée du présent billet m'est venue après avoir échangé quelques e-mails avec Mounir Bensalah. On a un diktat de cette caisse de compensation aau niveau de l'économie, elle bénéficie à tout le monde et surtout à ceux qui ne sont pas dans le besoin. Elle fait faire des économies et des bénéficies aux riches et préserve le budget des pauvres sans pour autant l'augmenter. Cette inadéquation sociale de la caisse de compensation laisse perplexe... pour une subvention, sur laquelle repose le niveau de vie, le panier et les budgets des ménages, il me semble difficile de prendre une tournure radicale dans ce dossier et de rallier ceux qui disent avec une fausse et dangereuse simplicité, arrêtons la! 

 

Avant tout, à mon sens, il ne faut surtout pas isoler les industriels des consommateurs finaux. En effet, si on retire la subvention par exemple du sucre aux biscuitiers, le prix final appliqué au consommateur sera majoré forcément et on n'aura affecté ce dernier et non les industriels, qui voudront toujours garder le même bénéfice. Nul besoin, à ce stade précoce de la réflexion de rentrer dans le débat sur le libéralisme et de l'auto-régulation du marché qui pourraient résulter de l'arrêt de ces subventions aux industriels.

 

Mounir Bensalah m'avait répondu que l'USFP avait déjà chiffré le changement du mode de versement et présenté lors de la campagne 2007 "Forsa". En gros, une adaptation du modèle brésilien où la caisse de compensation serait versée sous forme d'allocation aux plus démunis. Il m'a envoyé des pages web et des liens sur ce programme et pour celà, je le remercie.

 

Bien entendu, on ne peut être qu'être d'accord avec cette idée sur le principe. Sa mise en place et la logistique qui en découlereaient et la rupture qui marquerait les esprits sont un exercice bien périlleux. Forsa ou toute autre transformation de la répartition de cette caisse ne peut être qu'un plan étalé sur plusieurs années où un seul produit après l'autre ne serait plus subventionné.

 

Un jour, que je faisais mon plein d'essence, j'assistais à ce qui m'a donné l'idée qui va suivre. Je voyais côte à côte une Peugeot 205 qui n'avait plus de couleur que celle de la tôle presque et un Range Rover massif. Les deux propriétaires s'approvisionnaient en essence au même prix, subventionné de la même manière. Sauf que le premier est dans le besoin et fera un plein par mois, contrairement au second qui remplira son réservoir 3 à 4 fois par mois. D'où, mon idée de retenir que le 1er produit que la caisse devrait arrêter de subventionner est le carburant. J'étais confortée dans ce choix du 1er arrêt par le dernier rapport du FMI qui recommande l'arrêt de cette subvention carburant.

 

On pourrait me dire (et à juste titre), rien d'édifiant à ce que le FMI préconise la fin de la subvention du carburant en raison de l'alourdissement sur le déficit budgétaire et la balance commerciale du pays. En effet, les importations de pétrole brut ont coûté 3,18 milliards de dirhams de plus (1euro=11,5dhs) les six premiers mois, totalisant plus de 15,14 milliards de mad au lieu de 11,94 à fin juin 2010.

 

On ne peut réduire le taux de couverture du carburant que progressivement, selon un planning qui devra être mis en place sur quelques années. On doit préparer le terrain et enlever cette subvention par type de véhicule et type d'usage de transport... Il est juste de subventionner les transports en commun et donc le transport public (les autobus) mais il est injuste de subventionner les pleins d'essence aux Hummers ou Range Rover. 

 

Aussi, il faut trouver le rythme ("the pace") où l'on taxe un peu plus les riches et où l'on diminue progressivement la subvention, jusqu'à arriver à un taux de couverture ciblé par an. Tout enlever d'un coup, impactera le transport routier, donc le prix des produits consommables (frais de transport), le transport public donc les dépenses des ménages...les multiples conséquences seraient difficiles à maîtriser avec une rupture aussi violente. En somme, le carburant soutient tellement l'économie d'un pays de manière directe et indirecte, que l'on doit vraiment prendre le temps de réfléchir au procédé pour arrêter cette subvention de manière progressive.

 

Tous les indicateurs dont j'avais besoin pour ma simulation ne sont pas disponibles sur le net. En revanche, j'ai trouvé que l'actuel Ministre des Transport avait simplifié les montants des vignettes, alors que notre parc n'est pas si homogène que ça. Le principal critère d'amortissement et de segmentation des véhicules, après le type de carburant, à savoir le nombre d'années ne s'y trouve pas. On pourrait également penser à des grilles selon les régions. Les voitures imatriculées dans la région du Grand Casablanca doivent-elles subir les mêmes grilles que celles de Errachidia? On peut réellement débattre de ce dernier point. La grille des tarifs des vignettes m'a choquée par sa simplicité et les montants bas au vu des subventions. Il s'agit de la seule taxe sur laquelle l'Etat peut jouer pour rééquilibrer l'inéquité de la compensation.

 

J'ai procédé à une simulation d'une augmentation de la vignette auto, selon le nombre d'année et de puissance fiscale. En gros, il s'agit de faire payer le plus à la voiture la plus neuve et la plus puissante. Et l'on diminue à mesure que la voiture est vieille et moins puissante. Le barême est donc dégressif avec l'âge de l'auto. Sur la base des chiffres trouvés du parc automobile au Maroc, avec une simulation très optimiste j'ai pu "dégager" avec des hypothèse très réalisables une plus-value de 134 millions de MAD pour les véhicules particuliers UNIQUEMENT. Imaginez étendre ce raisonnement à tout type de véhicule et en ayant des chiffres exacts! 

 

Cette simulation m'a demandé moins de 2heures de travail avec des recherches limitées au net, mais les responsables de ce dossier ont tous les éléments en main pour faire d'autres simulations, d'autres hypothèses et de mettre en place un plan sur quelques années. Il n'est pas extraordinaire pour tout un chacun de se dire je paierai une hausse de prix de vignette équivalent à un plein d'essence à son prix "réel". On ne peut pas continuer à subventionner plus de voiturage, plus d'essence et ce pour des raisons économiques (facture lourde et volatilité du prix du pétrole), raisons environnementales (plus de voitures jusqu'à quand?) et sociales (inéquité par excellence).

 

Chers lecteurs, j'espère ne pas vous avoir ennuyé. C'est un sujet passionnant et complexe auquel je me suis quelque peu attardée mais ceci en vaut la peine, puisque le carburant est l'essentiel de la caisse de compensation. J"espère que les partis politiques relèveront le défi d'aborder ce volet sans populisme mais avec pragmatisme et précaution. Merci à @mounirbensalah, je ne l'ai jamais vu mais ses tweets, et articles me plaisent beacoup, et j'ai échangé avec lui avec plaisir et en toute simplicité. Vous pouvez le retrouver sur http://www.mounirbensalah.org 

 

 

Détails de la simulation :

- introduction: tous les chiffres de la simulation peuvent être remis en cause, et ceci est légitime! mon but était simple, ilustrer mes propos avec une base chiffrée. Montrer qu'avec une augmentation de vignette, on peut créer un delta de recettes! Alors la fourchette de 100mill de MAD à 500 mill de MAD est grande, mais on dira que c'est la somme de ruisseaux qui fait un fleuve ;)

 

 

- données:1,1 million de véhicules particuliers, âge moyen: 10,5ans

- hypothèse de répartition : 60% gasoil, 40% essence

- hypothèse de répartition par ancienneté et puissance fiscale: pourcentage dans tableau ci-dessous (en partant de deux suppositions, la moyenne d'age étant élevé j'ai établi un quota élevé aux trois paliers d'ancienneté moyens. Et loi de pareto oblige, 80% des voitures ne sont pas puissantes "fiscalement" donc 80% à moins de 10CV).Bien entendu, toutes les hypothèses peuvent être remises en question, mais ce qui m'intéressait le plus, c'était le DELTA généré.

 

 

     < 8 CV  8 à 10 CV 11 à 14 CV  >= 14 CV
13% 1 A 5 ANS 50% 30% 15% 5%
17% 6 A 9 ANS
30% 10 A14 ANS
17% 15 A19 ANS
13% 20 a 25ANS

 

 

 A partir de ces hypothèses de répartitions,

 

 

   < 8 CV  8 à 10 CV 11 à 14 CV  >= 14 CV
gasoil  700 DH   1 500 DH   5 000 DH  10 000 DH
1 A 5 ANS 1200 2100 6000 13000
6 A 9 ANS 900 1900 5600 12000
10 A 14 ANS 800 1700 5400 11500
15 A 19 ANS 750 1600 5100 11000
20  a 25 ANS 700 1500 5000 10000

 

 

 

         
 Essence   350 DH  650 DH   2 000 DH    4 000 DH 
1 A 5 ANS 750 1150 3620 7400
6 A 9 ANS 550 900 3180 6600
10 A 14 ANS 450 870 2740 5800
15 A 19 ANS 400 760 2420 5160
20  a 25 350 650 2000 4000

 



13/08/2011
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