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Victoire des urnes au Maroc et défaite de l'Istiqlal!

Le parti Istiqlal a perdu les élections 2011, même dans mes pronostics qui n’étaient pas en sa faveur il y a quelques semaines, je lui accordais davantage d’électorat (voir mes tweets favoris). Les élections se sont déroulées en transparence pour la deuxième fois peut être, mais cette année, aucun parti artificiel anti-PJD n’a été créé la veille.  

 

Les urnes ont gagné, le vendredi 25 Novembre 2011 est une victoire pour tous ceux qui voulaient faire entendre leur voix! Ces dernières élections représentent une amorce de la démocratie. Le Figaro parle d’ « une rupture à la fois institutionnelle et idéologique avec le passé ». Les Marocains ont voté pour le changement, quand d’autres n’y croyaient pas et ont décidé de ne pas se faire entendre ou de voter blanc. Ceux là ont gagné, malgré une certaine volonté perçue de vouloir maitriser un électorat connu et prévisibile. En effet, les électeurs devaient être inscrits malgré les requêtes de certains partis de pouvoir voter avec la carte d'identité, les MRE devaient envoyer une procuration et les délais d'inscription trop avancés par rapport à la campagne... La pression du mouvement du 20 février a, d'après moi, contribué à la transparence des résultats et la non création d’un parti artificiel. De manière indirecte, ces jeunes ont permis une fois de plus au pays d’avancer vers la démocratie, même s’ils ont échoué sur l’appel au boycott. S'ils avaient adopté une autre stratégie que celle-ci, le paysage politique serait peut être dans une autre situation...

 

Le premier parti du Maroc est le Parti pour la Justice et le Développement, malgré les découpages et contre découpages ne l’aidant pas forcément. Il a mené une campagne certes, plus modeste financièrement que d'autres, mais il a su miser sur l’implication personnelle de ses candidats qui ont sillonné le Maroc, investi Internet et accordé de l’importance à tous les acteurs de la société marocaine. Le PJD a récolté en termes d’électorat : son fonds de commerce habituel, les gens contre la corruption et pour la méritocratie et ceux qui ont effectué le vote sanction contre les autres partis historiques. Il a remporté sa légitimité auprès des Marocains, lorsqu’il a partagé publiquement les convictions profondes et communément partagées des citoyens. A savoir, lutter contre la corruption en maintenant les valeurs identitaires, exiger le changement dans le respect de la royauté et l'islam. S’il n’a pas obtenu 40% comme par ailleurs, c’est parce que quelques partis sont encore soutenus par d’inconditionnels supporters naïfs peut être ou exceptionnellement optimistes.

 

Le parti Istiqlal a quant à lui, fait profil bas en termes d’événements, de conférences, de rencontres avec la population, mais présent dans la presse pour ne pas se faire oublier par son électorat traditionnel. La notion d’éthique pendant la campagne était oubliée de plusieurs titres de presse. Les articles, que l’on peut aussi qualifier de publi-reportages dressaient le tableau de stars, de héros dont on ne pouvait se passer pour assurer le travail, au vu de leur longue expérience et de leurs réalisations pendant les quatre dernières années. Dans leur insertion publicitaire du programme de l’Istiqlal (page en blanc et rose), ils se sont même accaparé le gouvernement de manière indécente en écrivant, je cite « Au cours des 4 dernières années, nous avons augmenté le pouvoir d’achat des bas salaires en augmentant chaque fonctionnaire d’au moins 900dhs par mois et en augmentant le Smig et le Smag de 25% ». En dehors de ces déclarations de faiseur de miracles, ce parti mériterait la palme de la discrétion pendant cette campagne à comparer par exemple avec le RNI (Rassemblement National des Indépendants) qui a investi tous les types de support, oganisé plusieurs événements pour gagner des électeurs et se positionner en tant qu’alternative « raisonnable » par rapport aux « Islamistes ». En effet, le RNI a gagné l’électorat non désireux de voir les Islamistes gouverner. Si le PJD bénéficiait du vote « sanction », le RNI a quant à lui fédéré le vote jugé « utile », le vote anti-PI et anti-PJD.

 

La gauche a certainement perdu ces élections, de manière prévisible, les votants traditionnels lui ont fait savoir leur désaffection. Ce sera très intéressant de voir si ces partis vont procéder à la mouvance démocratique voulue par ses anciens supporters, revenir à leurs idéologies fondatrices. Le phénix déjà mort, vient d’être enterré. Ils ont quatre ans pour tenter de le ressusciter. Seul le PSU, absent, aurait pu faire une différence à mon humble avis. Il aurait pu bénéficier en plus de son électorat habituel, des contestataires, des votes blancs et de certaines voix accordées au PJD. Il va falloir attendre quatre ans pour connaitre son poids dans le nouveau paysage politique marocain en continuelle mutation.

 

En tout cas, c’est la première fois que l’on a autant de chances de voir le Parlement réellement travailler. Le tout est de savoir aujourd’hui qui formera la coalition gouvernementale et qui jouera le rôle de l’opposition. Tout reste à faire, le PJD devra penser à la double échéance à moyen et long termes : faire ses preuves avec des stratégies sectorielles qui bénéficient d’un maximum d’effets d’annonce tel que le Transport ou l’Agriculture par exemple, et amorcer de réels changements qui prendront plus que quatre ans tels que l’Education.

 

J’avais précédemment tweeté que le Parti Istiqlal ne voudra pas céder les stratégies sectorielles et certains autres postes clés. Le PI pourrait tendre le piège idéal au PJD, en ne voulant d’aucun Ministère dédié au développement « humain », à savoir l’Education, la Justice et la Santé. La gestion de ces trois domaines est particulièrement périlleuse, le PI pourrait vouloir récupérer l'électorat perdu ce jour, en montrant l’incapacité du PJD à réformer ces secteurs qui pâtissent d’un héritage lourd en termes d’erreurs et de mauvaise base de départ. Les stratégies sectorielles sont quant à elles, les plus faciles portefeuilles au gouvernement, parce que la voie est tracée et la stratégie est déjà fixée par les cabinets de conseil en stratégie.

 

Le PJD a su conquérir un électorat, il lui appartient à présent de relever le défi de gouverner une première fois dans un contexte économique particulièrement difficile. La formation de la coalition et du gouvernement sera sa première épreuve qui scellera à moitié sa mission des quatre prochaines années. A suivre…



27/11/2011
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