twitto ergo sum

Schizophrénie fiscale #OpenMakhzen

La politique fiscale et la transparence des comptes dans l'économie marocaine est très variable selon le secteur, le type de société et la nature de l'actionnariat. Comme dans d’autres maux qui affectent la société marocaine, nous avons encore une fois deux extrêmes. Du point de vue des impôts et des taxes, vous avez un versant blanc et un versant noir. Je ne veux pas évoquer toute l’économie grise, les passe-droits et la corruption dans les hautes sphères économiques, je veux évoquer la corruption admise et quotidienne, qui nous empêche d'avancer et qui nous interdit d'adopter toute politique sociale. Je veux parler des contradictions dans l’économie marocaine, quand vous basculez d’un modèle rigide à l’allemande à un foutoir absolu, à un déni de richesse qui a fait couler un pays comme la Grèce. Pour une entreprise, il faut être de type société anonyme ou être cotée à la bourse pour être légalement obligée de procéder à une expertise comptable pour le premier cas et auditer les comptes par deux commissaires aux comptes pour le second. On ne rigole pas avec la bourse. Pour les autres, faites confiance à leurs experts comptables….

 

Nous sommes schizophrènes sur ce plan également, à mon grand désarroi. D’un côté, il est demandé à un nombre d’entreprises d’auditer et de certifier leurs comptes, de les publier dans les journaux et de tout déclarer au centime près, de l’autre on ferme les yeux sur de très grandes entreprises privées marocaines qui font une bonne partie de leur commerce au black, sous estiment les revenus générés pour ne pas payer de TVA dessus, et déclarent au plus 10% de leurs bénéfices. Nous sommes capables du pire et du meilleur, mais le pire est beaucoup plus étendu. Nous n’avons aucun économiste qui n’a jusque là tiré la sonnette d’alarme sur la contradiction de cette politique fiscale rigide pour quelques uns et permissive pour la plupart. Comme illustration de ce phénomène, de nombreux milliardaires se plaignent de la crise, declare quelques centaines de milliers de dirhams de bénéfice, mais ont pourtant un yacht et une Ferrari comme derniers achats.

 

Pour toutes ces entreprises privées qui jouent et profitent de ce laxisme, le chiffre d’affaires est année après année au mieux stagnant et les charges sont toujours gonflées pour réduire le bénéfice et de fait l’impôt calculé dessus. Leurs caves et sous sol regorgent de coffres blindés et l’argent sort toujours emballé sous plastic noir ou enveloppe scellée. Regardez autour de vous et dites moi qui déclare tout ? Dites moi combien d'entreprises hormis celles qui doivent être auditées paient tous leursimpôts? Combien déclarent tous leurs revenus, tous leurs bénéfices ? Avec d’un autre côté l’agriculture qui est exemptée d’impôts, l’immobilier qui s’auto-attribue une exemption de taxes sur 25% à 33% du revenu non déclaré, vous avez une meilleure vision sur notre schizophrénie de collecte d’impôts et de taxes.

 

En somme, très peu de sociétés et de structures qui jouent le jeu de tout déclarer, mais elles doivent payer pour toutes celles qui ne contribuent en rien au renflouement des caisses de l'Etat. Demandez aux comptables, ils sont experts en l’art « comment faire pour moins déclarer ? » « comment bien s’éclater en rythme de vie sur le dos de sa société ? ». Du fait que peu déclarent, l’équation devant aboutir tout de même à un minimum de collecte de richesses, les impôts et taxes sont fixées à des seuils élevés et doivent le rester pour faire payer un maximum au minimum qui contribue. Et puisque les seuils sont fixés si haut, tout entrepreneur qui se lance, malgré toute son honneteté et son intégrité, se retrouve tenté de cacher à son tour aussi. En gros, on a un système qui s’auto-détruit, pour lancer une entreprise rentable, il faut tricher parce que les impôts sont élevés, donc on ne déclare rien, alors l’Etat ne gagne rien et on ferme les yeux…parce que d’autres plus grands le font bien… et ne veulent rien changer à la loi ni à son exécution. Mais d'un côté le jeune entreprenuer cache des milles et des cents, quand les grans noms ne dévoilent pas des millions.

 

De manière très simple et très pragmatique, nos hommes politiques peuvent changer cette donne, peuvent mettre en place des lois qui dissuaderait toute entité omettant de déclarer une richesse à la collectivité. Mais plusieurs d’entre eux ont décidé de faire de la politique pour protéger leurs intérêts économiques. Alors ne rêvons pas, tous les gentils patrons montrent patte blanche avec des comptes de résultats allégés de partout sauf au niveau des charges pour cacher leur porte-feuille gris. Ces entrepreneurs sont dans l’immobilier, le textile, le commerce, l’industrie…etc heureusement que la taille de ces entreprises n’est pas équivalente à celle des armateurs grecs, autrement mon style serait plus sec…

 

Nous sommes bien hypocrites et même sur ce plan on veut fermer les yeux et faire comme si de rien n’était… Alors soit! n’en parlons pas puisque de toutes les manières il ne faut jamais parler des sujets qui fâchent, il vaut mieux s’attarder sur d’autres futilités et laissons les uns s’enrichir en cachette et ne collectons rien de plus pour les pauvres qui réclament "justement" un soutien de l’état. Restons dans notre cercle vicieux... il est doux et n'aime ni le scandale ni la prise de tête...



30/10/2011
2 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour